La fin des métaux en bouche

Aujourd’hui, vingt-huit métaux différents entrent dans la composition des alliages dentaires de comblements et de reconstitutions prothétiques. Or, nous savons que tout métal placé en bouche réagit inévitablement au contact de la salive. Il en résulte une production de micro-courants électriques appelés galvanisme buccal. La corrosion qui en découle s’accompagne de l’émission d’ions qui sont arrachés aux métaux et génèrent un flux de particules métalliques qui diffusent dans les tissus environnants (dent, gencive, os) et sont avalés avec la salive.

Les métaux en bouche font l’objet de vifs débats alimentés par la paranoïa de leurs détracteurs, nous ne rentrerons pas dans cette polémique médicale, mais on peut tout de même s’interroger !

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La dentisterie restauratrice et la prothèse conjointe ont subi des bouleversements considérables ces dernières années, liées à la préservation tissulaire, le bio-mimétisme, l’évolution des matériaux (adhésifs, colles, composites, céramiques) et à la notion même de preuves scientifiques (Evidence Based Dentistry). Aussi, de nos jours, nous avons dans notre arsenal thérapeutique des solutions nouvelles qui ont fait leurs preuves et qui permettent d’occulter les problèmes inhérents à la présence de métaux en bouche, même si l’implant en titane reste toujours d’actualité, faute de mieux.

De l’amalgame au composite et à la céramique

Pendant plus de 170 ans, l’amalgame dentaire s’est imposé comme le matériau d’obturation dentaire par excellence. Ses propriétés mécaniques et biologiques, la possibilité de restaurer les fonctions originelles de la dent tout en assurant une étanchéité pour éviter une récidive de carie sans atteinte pulpaire ni sensibilité dentinaire, en ont fait le matériau de choix pendant toutes ces années. En revanche, les points faibles de l’amalgame que sont la qualité médiocre de son interface avec la dent, sa sensibilité à la corrosion, son inesthétisme, les problèmes environnementaux liés au mercure et, plus que tout, l'architecture cavitaire qu’il impose, font qu’il ne remplit plus les exigences actuelles en matière de conservation maximum des tissus sains et du concept de dentisterie minimalement invasive.

Au cours des années 60, pour pallier les problèmes que posent les amalgames, un nouveau type de matériau s’est développé : les résines composites et leurs adhésifs dentaires. Les performances de ces molécules ont été améliorées de façon significative via des modifications de leurs formules chimiques…mais ces produits contiennent et peuvent libérer du BISGMA, du BISDMA, ou encore du bisphénol-A qui peut soulever des controverses, même si l’on sait qu’il n'existe aucun impact environnemental prouvé de ces substances. La céramique est reconnue aujourd’hui comme le matériau le plus inerte pour les restaurations dentaires et d’une durée inégalée, mais son inconvénient majeur est son coût.

Alors quels seront les matériaux de demain ?

L’évolution des technologies dentaires, les demandes esthétiques des patients toujours plus grandes et la conscience écologique de chacun d’entre nous au niveau de la santé et de l’environnement fait que nous parviendrons probablement très rapidement à trouver un matériau avec une composition plus performante et totalement biocompatible qui répondra parfaitement au cahier des charges.

De l’implant en titane à l’implant en céramique

Le titane est à ce jour le matériau de référence de la majorité des systèmes implantaires en odontologie du fait de ses propriétés biomécaniques, bio-physico-chimiques et son excellente biocompatibilité. Il n’en reste pas moins un métal et il possède, comme tous les métaux, un potentiel allergène dépendant de facteurs généraux et locaux pouvant engendrer diverses manifestions. Les implants en zircone présentent des avantages esthétiques et biocompatibles indéniables mais ils ne peuvent se prévaloir aujourd’hui d’être la solution universelle du fait d’un panel de choix limité à une morphologie unique monobloc. L’avenir est devant eux !

De la reconstitution corono-radiculaire (RCR) métallique à la reconstitution fibrée

On distingue deux grandes familles de reconstitutions corono-dentaires :
• Les RCR directes utilisant des matériaux insérés en phase plastique (RMIPP)
• Les RCR indirectes réalisées au laboratoire de prothèse ou en CFAO.

Le choix entre l’une ou l’autre de ces deux solutions thérapeutiques est basé sur le critère du nombre de parois restantes et la quantité de substance coronaire résiduelle après préparation périphérique ainsi que la capacité d’isolation des fluides buccaux. Pendant de nombreuses années, des tenons métalliques, constitués d’alliages nobles ou non, ont été utilisés pour la rétention intra-radiculaire des dents, noyés dans un moignon coronaire en amalgame ou coulés pour une reconstitution monobloc.

De nos jours l’utilisation de matériaux fibrés et de composites ayant des propriétés physiques similaires à celles de la dentine (module d’élasticité proche de celui de la dentine et un comportement mécanique anisotrope) constituent la meilleure approche pour restaurer les dents dépulpées. Les procédures adhésives au niveau radiculaire et coronaire renforcent les structures résiduelles et la rétention de la restauration (Dietschi et al. 2007 ; Juloski et al. 2014). Ce type de reconstitution repose sur le principe d’économie tissulaire en préservant les tissus dentaires résiduels.

Depuis peu la société ITENA Clinical a mis sur le marché, des blocs et des disques conçus pour les technologies CFAO, composés de fibres de verre unidirectionnelles intégrées dans une matrice de résine époxy qui allient une précision d’adaptation du moignon à la dent associée à des propriétés mécaniques inégalées en comparaison d’inlay core métallique ou céramique.

Le principe de précaution, la conscience écologique nous interpelle quant à l’utilisation des reconstitutions métalliques en dentisterie. L’évolution des composites, des colles et des céramiques, sans oublier les matériaux de demain que nous ne connaissons pas encore, annonce sans aucun doute la mort certaine des métaux en bouche dont l’heure de gloire est passée.